Virginie Martel, Université du Québec à Rimouski (UQAR, campus de Lévis)
Céline Sala, École Supérieure du Professorat et de l’Éducation, Université de Montpellier
R2-LMM - Vol.7. MAI 2018
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International Standard Serial Number
ISSN 2368-9242
R2-LMM - Vol.7. MAI 2018
L'image dans les disciplines des sciences humaines et sociales : enjeux et usages éducatifs
Lieu de publication: Montréal
Éditeur: Groupe de recherche en littératie médiatique multimodale
Date: mai 2018
Périodicité: bi-annuel
Numéro ISSN: 2368-9242
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Vol. 7 | 2018 (mai)
Alors que les pratiques d’enseignement restent encore magistrales et appuyées sur des documents aux fonctions illustratives, il importe de se questionner sur la formation initiale et continue des enseignants d’histoire et de géographie au secondaire. Cet article propose une grille d’analyse de documents variés concernant l’évolution du site patrimonial de la Chute des Chaudières entre Gatineau et Ottawa. Entre protection du patrimoine et revitalisation d’un site industriel désaffecté, nous proposons une approche problématisée afin d’analyser une variété de documents, dont des peintures et des photographies d’époque. Les analyses s’appuieront sur la perspective structurale de Lefebvre (1974) et la sémiotique architecturale d’Eco (1997). Il sera alors question de la production de l’espace par une société et comment elle peut être perçue ou analysée. Cet enjeu historique, géographique et civique permet de réfléchir au statut de l’image dans l’enseignement de ces disciplines et à l’intégration de pratiques centrées sur la critique d’une iconographie variée.
L’image fait partie prenante de notre quotidien. En classe d’histoire, elle occupe une place importante dans diverses sources documentaires. Toutefois, l’identification et la description des compétences en littératie multimodale requises par les élèves du secondaire pour lire l’image et le texte ont été peu étudiées. Considérant qu’en histoire, l’apprentissage passe par la lecture (Moniot, 1993) et sa compréhension (Cartier, 2003a), une étude a été effectuée en troisième secondaire auprès de quatre sujets afin de connaître leurs compétences spécifiques en lecture pour interpréter les modes (visuel, textuel, sonore et cinétique) de deux bandes dessinées historiques traitant d’un thème du programme d’histoire. Les résultats démontrent que leurs compétences en littératie multimodale semblent minimes : ils n’effectuent pas les inférences visuelles et textuelles en même temps, traitant un mode à la fois plutôt qu’en simultané, tout comme ils saisissent peu l’information complémentaire offerte par l’image (Martel et Cartier, 2015).
Les compétences de lecture d’œuvres d’art sont pour la plupart des compétences complexes et expertes. En conséquence, que peuvent apprendre des élèves de maternelle avec des livres d’art ? Quels apprentissages sont réellement acquis par les élèves dans ces situations ? Qu’est-ce qu’apprendre à lire une œuvre d’art ? En s’appuyant sur des extraits de séances dans une classe multiâge de maternelle (de trois à cinq ans), la présente contribution propose de réfléchir aux apprentissages pouvant être mobilisés par le travail avec des œuvres d’art : des attitudes comme la motivation ou la curiosité, des savoir-faire comme des comparaisons ou des tissages ou encore des connaissances sur les œuvres d’art et leur auteur. Comme nous l’illustrerons, certains élèves sont capables de s’interroger sur le sujet représenté, sur la réalisation pratique de l’œuvre, sur le style de l’artiste, ou de convoquer d’autres œuvres d’art comportant des éléments qui peuvent être comparés. Ces élèves sont en train de se constituer une véritable pinacothèque mentale.
Au Québec, pour obtenir leur diplôme d’études secondaires, les élèves doivent réussir le cours d’histoire du Québec et du Canada (MELS, 2003). Pour y parvenir, il est essentiel non seulement d’obtenir la note de passage dans le cours d’histoire de 4e secondaire, mais également de réussir l’épreuve unique, un examen certificatif qui compte pour 50 % de la note globale de l’élève (MEES, 2017a). Le taux de réussite à l’examen demeure faible : environ 71 % de 2012 à 2015 (MEES, 2015). Comment expliquer cette situation ? Ce texte présentera les résultats d’une analyse de 194 copies d’épreuves uniques d’histoire de juin 2014. Cette analyse suggère que la principale faiblesse des élèves se situe au niveau de leur habileté à interpréter les sources du dossier documentaire, particulièrement les sources iconographiques. Cette difficulté serait accentuée si le titre ou la légende associés à l’image ne partagent pas le même vocabulaire que celui employé dans la question.
Cet article résume certains éléments d’entrevues avec des historiens consultés par les créateurs des jeux vidéo d’histoire (JVH) Assassins’ Creed. La vingtaine d’heures d’entretien portait sur les JVH, les rapports entre consommation et science, création et production industrielle de masse, critique et dogme, démarche réflexive et usage public de l’histoire, éducation et reproduction sociale, fiction et vérité, histoire et littérature. Il en ressort que, quoiqu’il s’agisse d’un discours profane plutôt que savant, cette fiction en images traite de la constitution et de la marche du monde social, qu’elle affecte ses récepteurs et que ceux-ci gagneraient à apprendre, à l’école secondaire, à la lire de façon critique, comme des historiens.
Cet article, écriture croisée entre une chercheuse française en Arts du spectacle, enseignante au secondaire et un metteur en scène québécois, fondateur de la compagnie de marionnettes, Le Sous-marin jaune, vise à interroger le matériau du spectacle vivant, vecteur de l’éducation à l’image et à l’histoire. En nous situant dans la continuité des travaux en didactique de l’Histoire, nous proposons en premier lieu l’analyse de la mise en scène d’une adaptation pour marionnettes de Guerre et paix de Tolstoï. Ensuite, en nous appuyant sur la réception du spectacle par des élèves du secondaire, nous observons la position complexe de l’élève spectateur face aux « images théâtrales » et le pouvoir de remuement de la scène, le plaçant en témoin critique, habité par l’Histoire. Ainsi nous mesurons la légitimité et la fécondité d’une telle approche dans le champ de la culture humaniste, de l’éducation à l’image et de l’enseignement de l’Histoire.
L’utilisation des images dans les cours d’histoire prend de plus en plus d’importance malgré les nombreux problèmes de lecture et de compréhension que posent ces images. Gervereau (2004) propose aujourd’hui une grille de lecture multidisciplinaire des images afin que les enseignants puissent l’utiliser en fonction de leurs objectifs. L’utilisation de cette grille doit permettre aux élèves d’acquérir les compétences nécessaires au décryptage des images en histoire afin de pouvoir être critiques par rapport aux flux d’images contemporains. Cet article propose une analyse des séquences disponibles sur le site Édubase histoire-géographie, pour le chapitre de la classe de seconde générale « Révolution, libertés, nations à l’aube de l’époque contemporaine » au regard de la grille de Gervereau et des compétences travaillées en classe de seconde.
La recherche dont il est question dans cet article rassemble des chercheurs qui, dans chacun de leur champ d’expertise (didactique de l’histoire, du français ou des arts), réfléchissent à la littératie et notamment à l’éducation à l’image considérée comme une condition de construction et d’accès à un savoir critique et réfléchi. À partir d’ensembles multimodaux (Domingo, Jewitt et Kress, 2015), organisés sous forme d’enquêtes culturelles (Sala, Villagordo et Halimi, 2015), l’étude réalisée met en lumière les savoirs et surtout les pratiques que des enseignants (n = 10), québécois et français, et leurs élèves mettent en œuvre lorsqu’il leur est demandé de s’investir dans des situations d’enseignement/apprentissage qui exigent de traiter des documents variés ayant une thématique historique partagée. Plus spécifiquement, les données descriptives obtenues par cette étude de cas multiples permettent d’éclairer la sélection par les enseignants et l’appréciation par les élèves des documents, surtout visuels, retenus dans un contexte d’enquête culturelle, l’accompagnement pédagogique (fort modeste) de la lecture des images et l’apport de l’enquête culturelle comme dispositif d’éducation à l’image.
Les auteurs d’albums pour enfants n’inventent pas d’espace, ils l’interrogent, le racontent. Comme dans la vie réelle, les personnages littéraires de Rotraut S. Berner traversent ce que Georges Perec nomme des « laps d’espace ». Qu’il soit rural ou urbain, proche ou lointain, l’espace représenté par Rotraut S. Berner lui permet de construire son rapport au monde. Représenter ces différents espaces semble être une problématique importante chez cette illustratrice allemande. Dans cet article, nous interrogerons l’image de l’urbain que propose la série des Livres des Saisons. Bien plus qu’une simple analyse des paysages réalisés par l’autrice, nous étudierons la portée illocutoire de ces images. Grâce à une expérimentation menée dans une classe de CM2 d’une école périurbaine de l’agglomération de Tours, nous montrerons que faire passer les élèves de la position de lecteur puis d’auteur d’album les amène à modifier leurs représentations et leur permet de construire des concepts géographiques.
Les images sont omniprésentes dans le quotidien des élèves du XXIe siècle. Mais, savent-ils, savent-elles les utiliser ? Si les programmes scolaires semblent souligner l’importance de cette « éducation à l’image », plusieurs recherches tendent à démontrer que dans les classes, dans bien des cas, les images restent encore aujourd’hui de simples illustrations de l’écrit. Nous témoignons ici d’un projet mis en place dans une classe de cinquième année du primaire à Montréal en 2015, dans le cadre duquel, nous avons proposé aux élèves une série d’activités mettant à profit un type d’image particulier : la photographie. Nous l’avons ainsi utilisée dans trois perspectives : comme source historique, comme témoin du résultat d’une recherche sur l’histoire du quartier et enfin comme témoin de leurs représentations initiales du concept de patrimoine. Cette dernière perspective nous permet d’observer le fait que, pour ces élèves, le patrimoine semble essentiellement s’illustrer par des inscriptions et des éléments architecturaux qu’ils et elles considèrent comme « vieux ».